Peux-tu te présenter ?
Je suis né le 21 mai 1953 à Rouen, marié à Martine depuis 1981.Un enfant, Jules, 18 ans.
Ton passé de pilote ?
A mon époque le championnat de France ressemblait un peu à ce qui se pratique aujourd’hui : peu de courses, quelques véritables circuits comme Le Mans, Le Paul Ricard, Ledenon, Nogaro, Albi, Dijon, Pau, nous accueillaient. Mais par contre nous courrions aussi sur des circuits improvisés tels que Mayenne, Dinan, Avignon, Cognac. Les pilotes de Grands Prix venaient régulièrement dans ce championnat, ce qui relevait évidemment le niveau. Quant à mon palmarès en championnat de France c’est : 3 fois vice-champion 125 inter en 1976, 1977 et notamment en 1979 où j’aurais dû être titré mais cette année là le règlement était confus. Les points marqués en Grands Prix comptaient pour une part au classement du championnat national, ce fut la seule année ; et Thierry ESPIE sur sa 125 Motobécane d’usine fut consacré malgré ma belle 5ème place au Grand Prix de France au Mans et ma 3ème place au Grand Prix de Suède.
Tes meilleurs souvenirs de courses ?
Ma 1ère victoire en coupe KAWA au Mans alors que j’étais repêché de justesse en 1973. Evidemment mon podium au GP de Suède, ce jour là j’étais bien placé entre la 6ème et 8ème place devant un certain Michel ROUGERIE à qui Motobécane venait de confier leur 125cc. La pluie dans les derniers tours me permit de finir 3ème à la surprise générale.
Des anecdotes ?
Le premier GP en Autriche fut rocambolesque, arrivés au Salsburgring dans les montagnes autrichiennes, le circuit était recouvert de neige. Les organisateurs et la FIM s’entêtaient chaque année à débuter par ce pays où la météo était forcément hasardeuse fin avril. Le GP fut tout simplement annulé, la neige avait continué de tomber toute la semaine, imaginez les pilotes avec leurs camions et caravanes dans ce décor ubuesque. Heureusement, après moult palabres avec les organisateurs, nous fûmes indemnisés par ces « indélicats » pour ce déplacement périlleux.
C’est donc direction Misano en Italie vers des températures plus clémentes, que nous arrivions en avance d’une semaine pour préparer le GP. Nous passâmes 15 jours au soleil dans le paddock à s’entraîner et à bichonner nos 125cc avec Guy BERTIN et sa petite famille. Bien affûté, j’attaquais mon 1er GP de l’année. Je terminais 7ème après une bagarre intense avec Hans Muller, quant à Guy, il fit second derrière Angel NIETO mais devant le local Loris REGIANI. Hélas après ce bonheur, nous apprenions que nous étions tous les deux déclassés pour départ anticipé. Quelle déception après tous ces efforts, merci Minarrelli, mais heureusement suite au visionnage d’une cassette et peut être d’une certaine pression de Michelin qui équipait ces deux usines, les Italiens retirèrent leur plainte et nous étions réhabilités.
Une journée type en championnat de France (ou en mondial) ?
Pour les GP, il nous fallait partir dès le mardi avec camion et caravane pour s’installer dans les paddock le mercredi ou le jeudi, les essais démarrant tôt le matin pour nous autres pilotes 125cc. Mais le plus sympa, c’était les longues périodes où nous partions disputer les GP qui s’enchaînaient dans la foulée, GP d’Angleterre, Suède, Finlande et retour en France pour le championnat. Nous étions en immersion totale dans le monde de la moto, les copains suivaient, les sponsors étaient présents. Lorsque les résultats étaient là, c’était génial.
Tes copains de l’époque ?
Dans mon année coupe KAWA, nous formions une joyeuse bande avec mes amis d’enfance : Hervé PIERRES, Gérard LEMOINE, Patrick TROQUE et Serge ORRU mais par contre les autres pilotes n’étaient que des concurrents. Toutefois, j’aimais bien Jean Claude MEILLAND le lauréat de la coupe KAWA 1973. Par la suite en GP, la colonie française des pilotes 125 formait un petit groupe de copains concurrents : PLISSON , HUTTEAU, SELINI , BERTIN, BOLLE, ESPIE, GALBIT, HEROUARD…
Ta reconversion, ton parcours professionnel ?
En 1983, me voilà rangé des motos mais pas des voitures… car après mes déboires avec mes magasins de motos, je rentrais comme magasinier vendeur de pièces de rechange dans le Groupe HECQUET pour un bail de longue durée, j’y travaille encore de nos jours pour la marque AUDI, de très belles voitures au demeurant.
Vas-tu encore sur les circuits voir des courses ?
Oui.
Si oui, lesquelles ?
Depuis quelques années, je me rends, au moins une fois par an, sur un GP (Le Mans, Barcelone, Mugello) pour voir en réel les pilotes et motos qui me fascinent toujours par leur spectacle à la TV. L’ambiance dans le public est sympa notamment en Espagne. Il faut dire que le circuit de Catalogne est un véritable stade dédié à la course. Un seul reproche sur les courses actuelles : les numéros sur les motos sont illisibles.
Ton regard sur le championnat de France moderne ? ou la vitesse en général ?
J’avoue ne pas connaître le championnat de France actuel mais je pense qu’il ressemble un peu à celui de mon passé. Quoique désormais davantage basé sur le 4 temps type SuperSport, SuperBike, nous aurons peut être ainsi des représentants qui brilleront en championnat du monde comme les S. CHARPENTIER, F. FORET et R. LACONI.Je crains par contre pour les 125 et 250 2 temps appelés à disparaître en GP, ce qui serait une grosse erreur mais les problèmes d’écologie doivent nous faire réfléchir aussi.
Connais-tu l’action de Christophe GUYOT avec le GMT Open concernant le championnat de France ?
Je suis l’action de Christophe GUYOT et ses efforts pour la course moto en France, cela ne doit pas être simple tous les jours de se battre contre le manque de reconnaissance des médias français. Il suffirait que les courses soient retransmises par Eurosport en direct, de quelques résumés sur les chaînes hertziennes et je suis certain que les sponsors afflueraient.
Connais-tu des pilotes du championnat de France ?
Non je ne connais pas les pilotes du championnat de France mais je vois des noms qui me font réagir : M. GINES, A. MICHEL, G. LE BADEZET, ce sont les fils des pilotes de mon époque. La roue tourne …
Des pilotes qui t’ont « marqué » (Grands Prix) ?
Hier
En 70/73 c’était évidemment le grand Jarno SAARINEN qui insuffla un nouveau style de pilotage avec ses guidons bracelets très inclinés et son déhanchement inspirant beaucoup d’apprentis pilotes dont je faisais partie. En France, le plus doué à mon avis, était Christian LEON, quel dommage qu’il n’ait eu sa chance qu’en endurance avec Honda. Ce pilote, bien trop timide, n’arrivait pas à se vendre comme les concurrents de son époque : les C. BOURGEOIS, M. ROUGERIE,O. CHEVALIER. Christian LEON, une classe au dessus de Michel ROUGERIE, j’en suis certain.
Aujourd’hui
De nos jours incontestablement le fils de Graziano ROSSI et aussi un petit homme Dani PEDROSA, il a mon gabarit (de l’époque) et arrive à dompter une moto GP, je me demande vraiment comment il fait.
Pratiques-tu la moto (route, piste) ?
Je ne roule plus sur route, c’est d’ailleurs là que j’ai eu le plus d’accidents. Par contre, j’adorerais rouler sur un circuit moderne avec une TZ 250 ou mieux sur un 125 MBA.
Motos possédées ?J’ai du posséder une cinquantaine de motos allant de la 100 YAMAHA à la 850 GUZZI « Le Mans » et une quantité de motos de vitesse et d’enduro.
Tes loisirs en dehors de la moto ?
Après mes années moto, j’ai fait beaucoup de sports : foot, tennis, course à pieds. Puis le karting m’a redonné le virus des sports mécaniques durant une dizaine d’années, créant même une petite écurie.
Interview réalisé par Francis Boutet pour le compte du GMT OPEN