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Alain Terras

Photo Gérard Délio, Eric Fontaine, René Adda

né le 28 mai 1956 (Clichy 92), décédé en 1989 

Il y a des pilotes qui vous marquent, pourtant ils n'ont pas été champion du monde, on ne se souvient même pas de leur palmarès ... on se souvient juste qu'ils étaient bons. Alain Terras fait partie de ceux là. J'ai en mémoire cette tête d'ange, ces bastons au Moto Journal 2000, ces courses en Angleterre et l'image de cette 1000 kawa d'origine qu'il a emmené à la 15e place du Bol 77 avec son coéquipier William Gougy ... je me souviens de ce don, de cette promesse de devenir un jour champion du monde ... et puis le trou noir. les années ont passé .. Le nom résonne dans ma mémoire comme une injustice, comme une erreur à réparer, rendre hommage à ce pilote avant que les ténèbres de l'oubli ne l'effacent complètement de la mémoire collective. Et ce fut la rencontre avec jean Basselin son meilleur ami qui voulait également rendre hommage à celui qu'il considère comme un frère ... alors la grande chaîne de solidarité s'est mise en marche. Jean a convaincu la maman d'Alain de nous confier des photos et vidéos, François Gomis a trié, numérisé les photos et a écrit un article, Jean Claude Jacq a réussi à redonner vie aux dizaines de bobines de film super 8 ... et aujourd'hui ce nom qui me hantait brille de mille feux ... Francis 

Alain Terras est le plus jeune pilote de la bande de Maisons-Alfort (94). Ses parents tenaient un restaurant près des bords de Marne, qui s’appelle bien sûr La terrasse, proche du Q.G. de la bande. Fan des Tchernine, Desheulles, Husson, Vassard, …, le « gamin » va d’abord faire des roues arrière sur son vélo pour que les « grands » (à peine plus âgés que lui pour la plupart) le remarquent, puis aller de plus en plus vite sur les quais de la Marne avec son Gitane Testi qu’il abandonne pour une 250 Kawa et la piste. 

Ses parents vont tout faire pour la passion de leur fils unique. Très vite, il se fait remarquer autrement que par son physique et sa décontraction. 

Alain, plus jeune inter de sa génération, va ensuite faire une carrière brillante mais irrégulière, aidé par Patrick Pons et Jean Claude Morénas notamment, et par le journaliste et motard Yves Mourousi. 

Jean Claude Morenas se souvient : "Sur les conseils et insistance de mon grand ami de l'époque Michel Rougerie j'ai acheté et fait peindre aux couleurs de mon magasin une Yamaha TZ 250 a Alain pour une saison.... Je ne connaissais pas vraiment Alain a cette époque je crois dans les années 75 /76 si ma mémoire est exacte ... j'ai aussi fait peindre la TZ350 Yamaha aux mêmes couleurs que la 250 mais je n'avais pas participé a l'achat de cette moto ... "

Parallèlement à la course, Alain collabore d’ailleurs avec Yves Mourousi lorsque lui sont confiées des missions gouvernementales. Les chanteurs Gilles Dreux et Pierre Billon le suivront également. Et la presse, friande du phénomène moto de ces années-là, utilise son image. À noter qu’Alain sera l’un des rares Français à courir au TT. 

Alain Terras laisse le souvenir très attachant d’un garçon adorable, talentueux, rapide, qui brûlera sa vie entre les circuits et le milieu du show-biz (et ses pièges), une vie à la James Dean, excessive, sans limites. 

Le « petit prince de la moto » s’éteindra des suites d’un terrible accident de la route qui s'est passé sur une nationale entre Avallon et Sermizelles le pays natal de son père où il adorait se ressourcer et pécher. P.S. : un immense merci à Jean Basselin, merci également à Eric Fontaine et à la «bande de Maisons-Alfort» pour la réalisation de cet article. 

François Gomis  

Hommage de Jean Basselin, son ami

Merci pour ton investissement dans ce nouveau portrait de pilote qu'était Alain Terras. Je veux juste t'expliquer que moi je suis arrivé à Maisons- Alfort en 1969 suite au déménagement de ma petite amie de l'époque de Boulogne Billancourt à cette banlieue diamétralement opposée; c'est d'ailleurs elle, qui un jour, m'a indiqué qu'un groupe de motards en Anglaises se regroupait dans un bar des bords de Marne. Je roulais moi même en Triumph Bonneville de l'année et me suis tout de suite intégré à ce petit groupe qui étaient en fait les grands frères de ce qui allait bientôt devenir la VRAIE bande de Maisons-Alfort. Il s'agissait de Thierry Tchernine roulant en Véloctte Thruxton, Gilles Desheulles idem, Patrick Choukroun, frère de Gérard, propriétaire d'une magnifique 450 Honda boite 5, Jean Pierre Jarrier équipé de la même monture, et quelques autres excités dont le patron Bernard Lefebvre, dit Max qui allait devenir important pour la suite des événements. 

Tout cela pour dire que ma génération était plutôt ces mecs là et pourtant les moments les plus forts de ma vie de motard étaient à venir ! Fréquentant ce bar régulièrement j'ai vu arriver dans le tout début des années 70 de jeunes garçons chevauchant pour les uns des Kreidler (Chouchou avec déjà son pote Gilles Husson en croupe) les autres en Gitane Testi comme Alain Terras nouveau venu également sur les bords de Marne où ses parents tenaient un restaurant formidable qui est devenu notre deuxième maison pour une bonne décennie. 

En 1971 après m'être tapé 18 mois d'armée je me retrouve sur les bords de Marne chevauchant une Honda 750 K0, la moto incontournable de cette époque et retrouvant mes petits potes qui eux aussi ont évolué et roulent maintenant sur de vrais motos . N'oublions pas que dans ces années le permis moto se passait à 16 ans et que nous roulions sans casque en agglomération !! 

Chouchou et Gilles sont inséparables sur la quatre pattes Speed de Gérard, mais Alain, un peu en retrait, car plus jeune n'a pas encore passé le pas des grosses motos de route, roulant sur son Gitane Testi, mais ne rêvant que de motos de course. 

On connaît la suite de l'évolution de ce viviers de pilotes en herbe, Gilles Husson avec l'aide de notre vraiment grand frère, Bernard Lefebvre a éclaté dès les premières course de Promosport 750 en surclassant tout le monde avec sa 750 H2, Chouchou pareil et Alain, grâce à ses parents dont il était le fils unique et le Dieu, se faisait sa place en Critérium 250 avec sa Kawa S2 .

Ses parents, qui ne savaient pas quoi faire pour leur fils, lui offriront de vraies motos de course, Yamaha TZ 250 et plus tard TZ 750 qu'Alain pilotera avec grand talent en maintes occasions. 

J'ai eu la chance de rencontrer au cours de ma vie un monsieur qui a fait grand bien au milieu de la moto, grâce encore une fois à Gérard Choukroun et son associé et ami Gérard Chappaz (pourtant mécène de Patrick Pons au départ !) pour lesquels je dirigeais leur concession Honda du Bdv Sébastopol, célèbre au milieu des années 70, en la personne d'Yves Mourousi, Monsieur Moto auprès du ministre de la jeunesse et des Sports, Jean Pierre Soisson, qui mettra tout en en œuvre pour que le talent d'Alain Terras soit reconnu. 

Alain était plus que mon ami, il était mon frère, il était le parrain de ma fille Julie, il a été mon professeur lorsque j'ai décidé de me jeter dans le bain de la course à presque 30 ans en Promosport et je suis allé lui parler durant ses 7 années de coma suite à un stupide accident de voiture entre Avallon et Sermizelles, le village maternelle ou il avait décidé de se refaire une santé au vert avant de leur montrer qu'il avait sa place sur une grille qu'elle soit en 3 1/2 ou en 7 1/2 . 

Sa maman Guiguitte, est presque ma deuxième maman, elle sait que j'aimais son fils et qu'elle peut compter sur moi vu qu'aujourd'hui elle a perdu les deux êtres les plus chers de sa vie, son mari et son fils. 

Je pense t'avoir ouvert mon cœur et te laisse carte blanche pour retranscrire à ta convenance mon ressenti sur toute cette période qui a vraiment comptée très fort dans ma vie. A ta disposition pour te raconter la suite au sein de ce clan dont j'ai partagé les courses durant plusieurs années et je peux t'assurer que je n'avais beaucoup de temps pour faire autre chose !!! 

Salut tous mes amis disparus, je vous ai réellement aimé. Une pensée à votre chronométreuse fidèle sur les courses de 24 Heures et ma compagne, Maurys, elle vous aimait autant que moi. Merci pour cette tranche de vie inoubliable qui me fait encore aujourd'hui dresser les poils sur le corps. Alain tu as été vraiment important dans ma vie et tu nous manques à Suzanne, Julie et moi . On t'aime.

Jean Basselin

René ADDA se souvient ... Fan de courses moto depuis 70, j’ai rencontré Alain Terras en 79. Nous avons sympathisé (comment aurait-il pu en être autrement?). Les lundis matin, il m’appeler pour me commenter ses exploits de la veille. En 80, avec un budget plus que limité, il décide de participer au MJ 200 au Paul Ricard avec sa Yamaha OW31. Petit soucis : pas de camion pour y aller. Quel honneur de pouvoir l’aider à disputer cette course importante ! Je lui prête donc le camion de l’entreprise, et il part dans le sud en compagnie de son ami et mécano… . Après des essais moyens, dus à une moto peu compétitive, il se retrouve presque en fond de grille, devancé par les Cecotto, Pons, Roberts, Baker, etc. Pas mal quand on bricole soi-même sa machine.
Le matin de cette course, Olivier Chevallier tombe en 250, sous mes yeux, dans le S de la Verrerie. Nous apprendrons son décès plus tard dans la journée.(Comment pouvait-on imaginer ce jour-là qu’il serait le premier de cette longue et terrible liste ?).
Puis vient le départ du MJ 200. Ciel menaçant suivi d’un orage brutal, d’un vent violent et glacial, et l’abandon de quelques favoris, surpris par des conditions météo dantesques. Alain, en transe, entame une remontée incroyable. Il remonte un à un de nombreux concurrents, se moquant des intempéries. Nous, trempés, on le voit à chaque passage à l’entrée de Signes, où il rentrait très fort malgré une adhérence précaire, et on se dit que 10, c’est déjà bien, puis, 9, 8, 7, etc. jusqu’à la 3eme place, derrière Fernandez et Pons,sur des machines bien plus performantes, et qui avaient pris une très grosse avance.A l’arrivée, transis de froid, le visage et les mains violets, on sent le bonheur absolu d’avoir profité à fond de cette opportunité, grâce à un courage et un talent hors du commun.
En retrouvant ces photos, j’ai revécu cette journée magique que nous avait fait vivre notre ‘héros’ . J’ai eu envie partager, la mémoire étant signe de respect, surtout 33 ans plus tard.
Merci Alain de nous avoir fait vivre cet exploit. On ne t’oublie pas.
 



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